Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Politique et liberté.

Hannah Arendt interroge le sens premier et originel de la "politique" qui, avant tout, est et doit être au service de la garantie des libertés personnelles. Aujourd'hui, la politique n'a plus d'autre sens que celui d'une conquête du pouvoir (totalement artificiel et conventionnel) pour imposer une idéologie.

Lorsque Hannah Arendt pose la question ; "La politique a-t-elle encore un sens ?" (cfr. éditions de L'Herne – présentation par François L'Yvonnet), elle pose en fait deux questions distinctes : celle de la signification du politique (avoir du sens) et celle de l'intention du politique (vouloir donner un sens).

La question posée est celle du sens de la "citoyenneté" (la "cité" en grec est la polis) c'est-à-dire, de celui d'une appartenance à une communauté ou, mieux, de celui d'une allégeance personnelle, volontaire ou obligatoire, aux pouvoirs d'institutions ou instances civiles ou sociétales édictant des règles et des normes de vie.

 

Et il ne faut guère s'en cacher, toute politique est la manifestation pratique d'une idéologie, c'est-à-dire d'une conception particulière, supposée idéale, de la vie en commun sur un territoire donné, c'est-à-dire, aussi, de la mise en application de valeurs éthiques et comportementales supposées idéales.

Le problème posé par la politique est celui de la gouvernance de la réalité collective, de la définition des modalités de gouvernement des gouvernés.

 

La réalité politique est au centre de deux bipolarités : d'une part, le rapport de force entre gouvernants et gouvernés, et, d'autre part, la priorité entre optimalité sociétale et autonomie personnelle.

On a donc affaire à une quadripolarité et non pas à cette dualité éculée entre gauche et droite, entre populisme et aristocratisme, entre égalitarisme et élitisme.

 

De là, la matrice suivante qui utilise des dénominations idéologiques qu'il faudrait revoir en profondeur puisque, de nos jours, le jeu de l'histoire politique et des réalités de demain induit confusions et chaos entre les termes :

 

 

Priorité à l'autonomie personnelle (individualisme)

Priorité à l'optimalité sociétale

(collectivisme)

Dominance des gouvernants (autoritarisme)

Juridisme

Communisme

Gouvernance des gouvernés (démocratisme)

Libéralisme

Socialisme

 

Hannah Arendt remarque, très justement, que de nos jours :

 

"(...) nous associons à l'égalité le concept de justice

et non pas celui de liberté (...)"

 

Les humains sont égaux dans le fait de pouvoir chacun vivre comme bon lui semble (sans nuire à autrui), mais ils ne sont pas du tout égaux dans le fait de ce qu'ils sont, ni de ce qu'ils font.

Un crétin a le droit d'être et de rester un crétin, mais chacun a aussi le droit de le considérer et de le traiter comme tel.

 

Au sens grec ancien, la politique est l'ensemble des dispositions qui garantissent, à chacun, l'exercice maximal de sa propre liberté personnelle.

L'idéologie originelle grecque était donc ultra-libérale (dans l'exacte limite où la liberté de chacun ne peut nuire à la liberté d'un autre). En ce sens, il n'existe donc pas de "valeurs" sociétales ou idéologiques qui puisse fonder et autoriser une réalité collective, sociétale ou communautaire qui serait supérieure à la personne.

La société, cela n'existe tout simplement pas (ni, par conséquent, la politique) ; en tous cas pas au-delà des libres associations temporaires de quelques personnes en vue de la réalisation d'un projet commun.

Il n'existe que des personnes individuelles et optimalement libres, notamment de s'associer temporairement, mais sans jamais nuire à la liberté de quiconque.

 

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