Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Economie et Néguentropie

L'économie n'est qu'un des champs d'application de la thermodynamique des systèmes. Le rendement global de l'économie réel ne peut qu'être de plus en plus inférieur à l'unité. La décroissance économique est inévitable puisque l'économie, par essence, détruit plus de néguentropie qu'elle n'en produit.

L'économie n'est qu'un des champs d'application de la thermodynamique des systèmes. Le rendement global de l'économie réel ne peut qu'être de plus en plus inférieur à l'unité. La décroissance économique est inévitable puisque l'économie, par essence, détruit plus de néguentropie qu'elle n'en produit.

L'économie transforme de la néguentropie[1] entrante Ne en néguentropie à haute valeur d'usage NH (des produits, biens et services) et en bien plus de néguentropie à basse valeur d'usage NB (des déchets).

L'économie consomme trois formes de néguentropie entrante :

  • des ressources c'est-à-dire de la néguentropie matérielle Nm (des gisements,  patrimoines ou équipements, en propriété ou en accès) ;
  • du travail c'est-à-dire de la néguentropie humaine Nh (de l'énergie humaine, physique ou mentale, soit actuelle, soit passée et thésaurisée sous forme d'argent, de capitaux, de financements) ;
  • de l'intelligence c'est-à-dire de la néguentropie immatérielle Ni (connaissances, savoir-faire, talents, notoriétés, etc …).

Chacune de ces trois formes de néguentropie s'use et ne peut être renouvelée que moyennant destruction de néguentropie amont (par exemple, de la néguentropie solaire ou géologique ou archéo-végétale, …) avec des rendements toujours largement inférieurs à l'unité. Plus la néguentropie amont devient rare ou inaccessible, plus ces rendements amont sont faibles.

La puissance relative de ces trois moteurs détermine le type d'économie que l'on pratique.

Traditionnellement, même si ces catégories ne sont guère adéquates, on disait que dans les secteurs primaires (économie agraire), la ressource domine, dans les secteurs secondaires (économie marchande et industrielle), c'est le travail, et dans le tertiaire (économie noétique), c'est l'intelligence. Ces distinctions ont de moins en moins de sens car, partout, la noétisation de l'économie est flagrante.

La seule chose que la thermodynamique permette de dire, mathématiquement, est que, toujours, on a :

Nm + Nh + Ni > NH + NB

La considération que tous les rendements thermodynamiques sont inférieur à l'unité et diminuent au fil du temps avec la rareté et/ou l'inaccessibilité de la néguentropie amont, suffit à démontrer que la croissance économique doit s'arrêter quelque part, puis diminuer. Ce point maximum a été dépassé, à l'échelle mondiale, environ en 2000.

Le PIB, qui ne tient compte que (très partiellement, d'où les * dans l'inéquation ci-dessous) de Nm, Nh et NH, est incapable d'indiquer quoique ce soit de sérieusement utile.

Le PIB est en croissance si l'on parvient à montrer que :

Nm* + Nh* < NH*

Ce qui, arithmétiquement, ne pose guère de problème puisqu'il suffit de faire baisser la mesure de Nm* (pression politique) et Nh* (pression sociale) et de faire hausser NH* (pression technologique), tout cela au dépend de Ni (la connaissance) qui croît et s'use lentement (diminution des budgets de recherche et médiocrisation des systèmes éducatifs), et de NB (la pollution) qui croît et s'accumule à une allure de plus en plus vertigineusement exponentielle au fur et à mesure que la néguentropie amont devient rare et/ou inaccessible.

Marc Halévy, 16 mai 2013


[1] La néguentropie est une grandeur de physique thermodynamique qui mesure la quantité d'énergie stockée à l'intérieur d'un système sous la forme d'énergie de liaison, c'est-à-dire d'organisation, de forme, de complexité, de sophistication.