Tisserand de la compréhension du devenir
Conférencier, expert et auteur

Les trois ennemis : le populisme, l'illibéralisme et le financiarisme

Être de gauche, c'est être du côté du "peuple". Être de droite, c'est être du côté des "nantis". Dans les deux cas, c'est être au service des humains. Je ne suis ni de gauche, ni de droite puisque je suis du côté de la Vie et de l'Esprit tout au-delà des humains.

Il est indispensable de répéter et d'approfondir cette idée cruciale que le financiarisme, comme le socialo-populisme, est un illibéralisme, que le financiarisme est la dictature de l'argent pour l'argent, une dictature de l'argent à court-terme au mépris de tous les équilibres à long terme, une dictature établie en parfaite collusion avec les institutions étatiques qui ont besoin d'énormément d'argent pour financer les subventions et assistanats, et, ainsi, "acheter" le pouvoir et la paix sociale.

 

De Nicolas Baverez à propos des démocratures populistes :

"Les populismes ne constituent ni un accident, ni une parenthèse destinée à se refermer rapidement. (…) Les populistes (…) portent une conception alternative d'une démocratie fondée sur la souveraineté absolue du peuple. Cette démocratie qui assume son illibéralisme, revendique le primat de l'élection qui conduit à remettre l'ensemble du pouvoir entre les mains d'un homme fort, dont la personne est réputée se confondre avec la nation. Avec pour conséquences la suspension des contre-pouvoirs, la suppression des libertés individuelles, le déni du pluralisme politique, considérés comme autant d'obstacles à l'efficacité de la décision politique (…)."

  • Financiarisme : souveraineté absolue de l'Argent.
  • Populisme : souveraineté absolue du Peuple.
  • Illibéralisme : souveraineté absolue de l'Etat.
  • Les trois fléaux s'unissent … l'Argent, le Peuple et l'Etat.

L'illibéralisme triomphe : Hongrie et groupe de Višegrad, Brésil, Inde, Philippines, Turquie, Russie,… et, partiellement, les USA … sans parler d'une Marine Le Pen en France ou d'un Matteo Salvini en Italie … sans parler d'un grand nombre de pays d'Afrique et d'Amérique du Sud qui leur ressemblent de plus en plus …et sans parler des dictatures pures et simples comme la Chine ou l'Iran, …

Mais la bonne attitude contre le populisme, le financiarisme et l'illibéralisme n'est pas un "retour" à la démocratie libérale …

Les thuriféraires de cette démocratie libérale et, plus généralement, de ce que l'on appelle encore les "idéaux des Lumières", ne comprennent manifestement pas trois choses :

  1. La démocratie est un système qui n'a jamais très bien marché et qui ne marchera plus jamais car elle a été confisquée par les partis politiques idéologisés et carriérisés, par la démagogie professionnelle, et par l'électoralisme et le clientélisme ; il faut aussi cesser de croire à l'intelligence des peuples car les masses sont de plus en plus incapables de comprendre la complexité réelle du monde, et les enjeux qui sont ceux de la politique réelle.
  2. Le libéralisme n'a rien à voir ni avec le capitalisme, ni avec le financiarisme. Il est fondé sur la liberté personnelle d'entreprendre, aux sens pleins et multiples de ce verbe. Il est, à la fois, un anti-étatisme et un anti-idéologisme radicaux ; cela signifie qu'il prône un Etat minimal uniquement confiné à la gestion des logistiques collectives non privatisables (en gros les investissements indispensables, mais non rentabilisables), et qu'il refuse de croire que l'on puisse réduire la réalité complexe des communautés humaines à des modélisations idéologiques quelles qu'elles soient.
  3. L'économie n'a pas pour finalité de faire de l'argent pour l'argent, de générer des profits maximaux, de servir des rentes financières aux actionnaires et des rentes sécuritaires aux salariés. L'argent est un moyen ou une conséquence, mais jamais un but. La seule finalité de l'économie est de produire de la valeur d'utilité ou d'usage, au meilleur prix possible afin de rémunérer de façon équitable toutes ses parties prenantes, et d'assurer, à la fois, sa propre pérennité et sa capacité d'innovation sur la durée.

Ces trois convictions n'ont pour objectif que d'empêcher la stupidité du Peuple, la cupidité de l'Argent et l'orgueil de l'Etat, de nuire et de mettre, enfin, l'humanité au service de la Vie et de l'Esprit.

A tout cela, il faut ajouter le fait que la mondialisation se termine sur un échec global et que la continentalisation du monde est en marche … également en ce qui concerne les modalités de fonctionnement socio-politico-économique. Et que, donc, que chaque continent aura sa propre logique ; espérons que le continent européen réussisse à se purger de ses miasmes populistes, illibéralistes et financiaristes.

La majorité des humains est ainsi faite qu'elle choisira plutôt le suicide demain à la discipline aujourd'hui.

Comme tous les nostalgiques du socialo-gauchisme qui en train de devenir un socialo-populisme, bien des mouvances entretiennent une confusion biaisée et fallacieuse entre capitalisme, financiarisme, monétarisme et libéralisme. Ce sont des doctrines et des pratiques complètement opposées, qu'un seul trait commun rassemble : l'opposition radicale au socialisme, au communisme, au collectivisme, au marxisme, au totalitarisme, au national-socialisme,  etc … toutes doctrines dont la seule issue a été des famines, des effondrements, des calamités, des persécutions, des répressions et des centaines de millions de morts non-naturelles au 20ème siècle.

De plus, comme tous les mauvais médecins, ces mouvances se concentrent sur les symptômes de la maladie (le délire des systèmes monétaires et boursiers) plutôt que de voir les causes de la maladie : des centaines de millions de gens qui voudraient vivre et consommer comme des riches et dont on achète les voix à coût de prêts à bas prix, de crédit à la consommation, d'assistanats et de subventions.

La finance spéculative mondiale, tant monétaire que boursière (qui m'est totalement odieuse), est une fuite en avant. Évidemment. Mais le vrai problème n'est pas là ! Le vrai problème est que beaucoup de pays vivent, depuis au moins cinquante ans au-dessus de leurs moyens et que leurs peuples doivent apprendre très vite à se serrer la ceinture et à consommer beaucoup moins de tout … et surtout de saloperies toxiques et de ludique inutile.

Il faut, bien sûr, combattre cette finance spéculative que certains appellent "capitalisme", mais à tort puisque le capitalisme est une technique de financement privé des investissements privés. Ce capitalisme peut être spéculatif ou entrepreneurial. Il faut combattre le "capitalisme" spéculatif (le financiarisme). Mais le capitalisme entrepreneurial doit être, tout au contraire, vigoureusement soutenu … sinon : pas d'entreprises, pas d'emplois, pas de revenus, pas de marchés.

Les banques et les institutions financières ne font que répondre à la demande de milliards d'abrutis qui veulent consommer n'importe quoi, selon leurs caprices infantiles, et qui, ce faisant, tuent la planète. La cause de tout ce marasme que nous vivons, est la propension des imbéciles à dépenser de l'argent qu'ils ne possèdent pas. Alors, forcément, il y a des malins qui trouvent des trucs pour fabriquer de l'argent à partir de rien. Mais ça, c'est la réaction, pas la cause.

Cessons de combattre et les symptômes et attaquons enfin les causes profondes de ce qui nous tue à petit feu.

Marc Halévy

Le 07 février 2020