Où en sommes-nous ?
Faire le point sur le chaos ambiant …
Où en sommes-nous ? Réponse en dix points …
- Nous sommes en plein milieu du gué d'une bifurcation paradigmatique (la fin de la Modernité née à la Renaissance et l'émergence d'un nouveau paradigme qui n'a pas encore de nom mais que j'appellerais volontiers le paradigme de la Noéticité).
- Ce passage d'un paradigme à l'autre est une zone chaotique dont les pandémies, le dérèglement climatique, l'effondrement de la biodiversité, l'exponentielle pollutoire … et les marasmes socio-politico-économiques (guerres des ressources, des marchés, des monnaies, des technologies, des normes, des influences, …) ne sont que les manifestations.
- Les institutions de pouvoir que la Modernité, dès le 16ème siècle, a mis en place pour assurer sa pérennité (Etat-Nation, Banque, Bourse, Patronat, Syndicat, Université et Médias) sont toutes devenues obsolètes, incapables de faire face à la montée en complexité du monde et à sa chaotisation actuelle (ainsi, les Etats sont paumés face à la pandémie … entre beaucoup d'autres choses comme la crise économique qui vient).
- Les nouvelles institutions de pouvoir qui seront les instruments régulatoires de la Noéticité, ne sont pas encore en place (elles le seront, sans doute, vers 2050 et balaieront toutes les structures propres à la Modernité, les Etats-Nations et la Finance mondiale en tête de liste).
- En l'absence de systèmes régulatoires efficients, la chaotisation prospère (et avec elle, ceux qui veulent profiter d'elle, comme les rétro-activismes ou l'islamisme, pour imposer leur vision nauséabonde du monde).
- Les Etats-Nations n'en sont probablement pas encore conscients, mais ils vont disparaître au profit d'organisations réticulées à l'échelle continentale (l'actuelle dislocation des Etats-Unis et l'actuelle paralysie de l'Union Européenne en sont de belles illustrations symétriques).
- Les Etats-Nations qui croient devoir survivre (pour allaiter tout un peuple infantilisé, étatisé et parasitique qu'ils ont rendu dépendant), agissent et réagissent de façon à préserver, voire à consolider, leur illusoire pouvoir sur le monde (et sur ses manifestations chaotiques comme les pandémies). Leurs réflexes prennent donc une tournure autoritariste qui amplifie la défiance à leur égard. De plus, l'inefficience flagrante de ces réflexes ne fait qu'accélérer leur inexorable déconfiture.
- De son côté, l'Economie n'est pas en reste et la chaotisation globale en secoue les fondements : elle vit un "crise" au sens du mot grec krisis : un tri ! Comme à la fin du jurassique, les gros dinosaures inadaptés sont en train de mourir (et appelle leurs alliés historiques, les Etats-Nations exsangues, à leur rescousse … au nom de la préservation d'un emploi qui, de toutes les façons, va disparaître) et les petits lémuriens rapides et agiles sont en train d'envahir les territoires économiques.
- Tout le tissu entrepreneurial doit se restructurer face à la révolution numérique (la robotisation et l'algorithmisation de 40 à 50% des opérations et le déplacement subséquent du centre de gravité des activités proprement humaines), la fin du salariat (en conséquence de la généralisation du télétravail), la pénurisation des ressources matérielles (notamment énergétiques) et l'apocalypse des illusoires ressources alternatives dites renouvelables, la réticularisation complexe des noyaux entrepreneuriaux, surtout à l'échelle continentale, l'effondrement imminent de la finance spéculative, la montée en puissance d'un modèle économique qui ne suivra plus les logiques de masse et de prix bas, mais bien celles de proximité et de valeur d'utilité (avec pour conséquence l'exigence montante de la qualité des produits et de la virtuosité des entreprises), la fin des idéologies du "profit" et la montée d'une exigence de "sens" et d'éthique.
- L'idée même de socialité s'en trouve tourneboulée : les idéaux des "Lumières", purs produits de la Modernité, meurent avec elle. Un nouveau "vivre-ensemble" émerge déjà qui se construit sur les concepts d'autonomie individuelle, de vocation spirituelle, d'identité continentale, de frugalité naturelle, d'interdépendance élective et sélective, et d'une intimité intériorisée.
Marc Halévy - Le 14/11/2020