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Relavitité générale

Deux observateurs, dans des états systémiques différents, prenant mesure d'un même phénomène, peuvent-ils aboutir aux mêmes lois physiques ?

La relativité généralisée pose le problème de la validité des théories physiques ainsi : deux observateurs, dans des états systémiques différents, prenant mesure d'un même phénomène, peuvent-ils aboutir aux mêmes lois physiques ?

Galilée avait posé le problème en réduisant la notion d'état systémique à la seule position dans l'espace. Einstein, dans son premier temps de la relativité restreinte, avait réduit cette notion à la seule vitesse de translation uniforme pour, dans le second temps de la relativité générale, l'étendre à l'état gravitationnel.

Essayons de reprendre le problème dans toute sa généralité.

 

Chaque observateur se distingue par un état systémique qui se définit[1] par un niveau métrique (la géométrie particulière de son espace-temps qu'Einstein avait réduit à sa seule composante gravitationnelle), par un niveau eidétique (le niveau néguentropique qui est le sien et qui traduit le degré de sophistication de ses organisations) et par un niveau dynamique (le niveau d'activité de la portion d'univers où il œuvre et dont la position galiléenne et la vitesse einsteinienne sont les expressions les plus élémentaires).

A remarquer que, parallèlement aux deux observateurs, le phénomène observé se situe, lui aussi, dans une portion d'univers caractérisée par ses propres niveaux métrique, eidétique et dynamique.

Nous avons donc affaire à la coexistence et à l'interférence de trois états systémiques différents qui, a priori, ne se connaissent pas mutuellement et qui communiquent entre eux par des signaux eux-mêmes influencés par ces états systémiques et leurs divergences.

 

Admettons que nos deux observateurs se soient mis d'accord sur le phénomène à étudier et pour respecter scrupuleusement les mêmes protocoles d'observation et de mesure. Bref : ils étudient le même phénomène avec les mêmes méthodes.

Chacun d'eux fera des mesures (les mêmes) qui donneront des résultats (différents). Les différences de résultats ont trois sources :

-       la première est la divergence contextuelle : la quantité que révèle la mesure, pour tout observateur, dépendra de la différence entre les états systémiques de l'observateur considéré et du phénomène, et des distorsions de signal que le différentiel entre ces deux états induira (par exemple, l'effet Doppler dû au déplacement de l'observateur déformera la fréquence mesurée d'un phénomène vibratoire éloigné).

-       la deuxième est la divergence référentielle : puisque les observateurs sont dans des états systémiques différents, leurs référentiels d'étalons et d'unités sont différents (par exemple, en relativité restreinte, les étalons de longueur et de durée subissent contraction ou dilatation selon le différentiel de vitesses entre les deux observateurs - qui est une composante élémentaire de leurs états systémiques).

-       la troisième est la divergence expérientielle : les erreurs de mesure faites par les deux observateurs ne seront pas les mêmes car deux mesures, malgré tout le soin y apporté, ne sont jamais absolument identiques.

 

Mais laissons, pour l'instant, de côté, les divergences expérientielles et concentrons-nous sur les divergences contextuelles et référentielles qui, au fond, indiquent que les états systémiques des trois parties prenantes (les deux observateurs et le phénomène) diffèrent, indépendamment de la mesure qui est effectuée.

Pour le dire très généralement, une mesure physique résulte d'une interférence entre l'état systémique du phénomène et celui de l'observateur. Si deux observateurs expérimentent la même interférence avec le même phénomène, mais sont eux-mêmes dans des états systémiques différents, leurs deux descriptions du phénomène seront différentes.

La question posée est celle-ci : malgré les divergences entre ces deux descriptions, pourront-ils parvenir à inférer des invariants semblables à partir d'elles ?

 

La physique quantique connait bien cette question puisqu'elle sait, depuis longtemps, que le résultat d'une mesure est autant révélateur de l'état du phénomène que de celui de l'observateur, et que de la nature du signal utilisé entre eux. Notamment, les relations d'incertitude d'Heisenberg découlent de ce constat.

Pour le dire autrement, la théorie quantique tient compte du différentiel d'états systémiques entre l'observateur et le phénomène (la divergence contextuelle) alors que les théories relativistes tiennent plus compte du différentiel d'états systémiques entre les deux observateurs (leur divergence référentielle).

 

Pour l'exprimer encore autrement : tout résultat de mesure contient autant d'informations sur le phénomène lui-même que sur l'état systémique du phénomène, de l'observateur, et du signal utilisé entre eux.

Comme la caractérisation de chaque état systémique nécessite un très grand nombre (voire une infinité) de paramètres et que cet état systémique évolue en permanence, il faudrait, à chaque instant, pratiquer trois infinités de mesures pour pouvoir filtrer les effets d'interférences entre états systémiques des observateurs, du phénomène et des signaux et atteindre la réalité du phénomène lui-même.

La seule conclusion possible est kantienne (ce qui est logique puisque l'on est parti de la dualité phénomène/observateur, c'est-à-dire d'une dualité objet/sujet) : il est impossible de connaître expérimentalement la réalité intrinsèque d'un phénomène. Notre représentation du monde mêle inextricablement les états des phénomènes, des observateurs et des signaux entre eux. Schopenhauer l'avait parfaitement compris et exprimé.

 

La seule issue est donc d'adopter une approche enveloppante qui englobe autant l'observateur que le phénomène et le signal, et qui les "voit" comme une seule et même réalité évolutive pour la concevoir comme un tout holistique, la mesure expérientielle n'étant alors qu'une convergence instantanée révélatrice de ce tout et de toute son histoire, et non d'un phénomène particulier.


Marc Halévy, avril 2013



[1] Cfr. ma théorie des systèmes et processus complexes in : "Un univers complexe" - Oxus - 2011